Des mondes construits, au Centre Pompidou-Metz

25 novembre 2019

Avec l’exposition Des mondes construits,  la sculpture sous toutes ses formes est à découvrir jusqu’au 23 août 2021 au Centre Pompidou-Metz. En fil rouge, l'abstraction en sculpture, et au sein de celle-ci, l'approche constructiviste plus particulièrement. Le lien à l'architecture, à l'idée de construction et de déconstruction, se retrouve tout au long de cet accrochage.

C’est l’une des rares expositions du Centre Pompidou-Metz qui met en avant la sculpture. Inaugurée ce vendredi, Des mondes construits réunit des oeuvres d’une cinquantaine d’artistes qui interrogent la matière et les formes. Leurs oeuvres sont les témoins de leur époque, de leurs interrogations, parfois leurs combats idéologiques, telle l'oeuvre de l'artiste russe Antoine Pevsner Monument symbolisant la libération de l'esprit. Cette exposition questionne, à travers la sculpture, la construction du monde. 

"A quoi sert l'art, si ce n'est à éveiller la pensée ?" commente Bernard Blistène, directeur du Musée national d'art moderne, lors de la visite dédiée à la presse. Ainsi les sculptures exposées peuvent apparaître comme des métaphores de la pensée, et dialoguent entre elles. Un dialogue qui prend forme d'emblée, dès la première salle d''exposition, avec Unboxing, littéralement "déballage", où l'artiste néerlandaise Falke Pisano joue, imagine des conversations, réelles ou fictives, entre différentes figures majeures de l'exposition. Sous forme de BD, de boîtes, avec des questions aux langages pluriels sur la sculpture, l'ensemble nous invite joyeusement à entrer dans ces mondes construits. "Nous ne sommes plus des spectateurs passifs. Nous pouvons nous permettre d'être plus ludiques et créatifs dans nos rapports aux oeuvres" précise l'artiste. Cette introduction des plus pédagogiques constitue un bon outil de médiation lors des visites organisées pour les scolaires, ou lors des visites libres en famille.

Pour prolonger cette idée de dialogue, les oeuvres ne sont pas exposées par ordre chronologique, mais par thématiques. Ainsi, dans la salle 3 baptisée "vertical/horizontal", La colonne sans fin de Constantin Brancusi s'étire, se dresse, héroïque, face à la sculpture posée au sol du minimaliste Carl André.

Le monumental laisse parfois place à des oeuvres plus petites, parfois poétiques, telles la série "Poèmes" de l'artiste Saloua Raoua Choucair, pionnière méconnue de l'abstraction au Liban. Petits objets pareils à des souffles qui se déploieraient dans l'espace, mélanges de matières singulières, ces petits poèmes plastiques, pareils à de petites architectures, peuvent évoquer des esquisses de monuments.

La poésie est aussi présente salle 13, joliment intitulée "La peau des choses". Les oeuvres enveloppent et préservent des objets domestiques, sacralisés en dépit de leur banalité. Ainsi le cocon de chrysocale - un alliage de cuivre, d'étain et de zinc - tressé par Guillaume Leblon dans les proportions d'un sacrcophage renferme des objets du quotidien gardés secrets.

 

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Dès le début du XXe siècle, une grande partie de la sculpture moderne s’inscrit en rupture avec la tradition, en choisissant la voie de l’abstraction. Il s’agit paradoxalement d’analyser le monde de façon plus objective et universelle : plutôt que de modeler la surface des choses, certains artistes comme les cubistes veulent en révéler l’organisation essentielle. Ils dissèquent leurs objets d’étude en lignes, volumes et plans.
Dans leur sillage, des sculpteurs de diverses avant-gardes baptisent leurs œuvres « constructions » ou « structures », optant pour une abstraction radicale, où prévalent la ligne et l’angle droits.
Si l’architecture industrielle nourrit ces tendances dites « constructivistes », parfois désireuses de produire des objets fonctionnels, la sculpture cherche aussi à redéfinir ce qui lui est propre : le rapport aux gestes, aux matériaux et surtout à l’espace, clairement structuré, voire modulable et dynamique, incluant le spectateur.
Les artistes modernistes veulent pour leurs sculptures une transparence et un équilibre qu’ils aimeraient voir transposés dans les structures humaines. Les pièces majeures de la collection du Centre Pompidou ici rassemblées interrogent l’éclosion de cette abstraction utopique, puis sa critique et, enfin, sa déconstruction contemporaine.

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