Metz à livres ouverts

1 décembre 2017

Romanciers, historiens, photographes : Metz inspire décidément toutes sortes d'auteurs ! Petite sélection de fin d'année, pour vous guider vers Noël...

Beau livre

  • Ville intime

Photographe de la Ville de Metz pendant plus de 20 ans, jusqu'en 2014, Christian Legay pose un regard nouveau sur la cité : la vie, les gens, les atmosphères, les lumières. Un livre grand format nourri d’images qui révèlent une subtile intimité entre le photographe et sa ville. Les textes de Francis Kochert qui accompagnent ce beau livre vibrent à l’unisson de ces clichés inimtables. Metz, portrait d’une ville, c'est le cadeau idéal pour les amoureux de Metz, ou pour ceux qui ne le sont pas encore !

Au-delà des classiques, de la colline Sainte-Croix à la Nouvelle Ville, de la cathédrale aux jardins, autant de lieux incontournables sur lesquels Christian Legay semble poser un regard neuf (la place Saint-Louis, un soir d'été, vous transporte en Toscane, et les arbres du jardin botanique vous réservent une surprise callipyge !), cette promenade à travers les siècles, les couleurs et les styles se termine par une escale contemporaine là où s'invente le futur : au Technopôle, à Borny, à l'Amphithéâtre et, bien sûr, depuis les galeries du Centre Pompidou, voici Metz telle qu'on n'a pas fini de l'aimer !

- Metz, portrait d'une ville
Photographies de Christian Legay, textes de Francis Kochert
Serge Domini éditeur, 168 pages, grand format, 39 euros
 

Livres d'histoire

  • La mutation impériale

Après les années bonheur, qui relataient la vie à Metz de 1950 à 1980 en plus de 300 images, Maxime Bucciarelli renouvelle son travail d'historien, d'archiviste et d'assembleur avec, cette fois, les années impériales, celles de la première annexion allemande, de 1871 à 1914. Ce bel ouvrage se compose de deux parties distinctes, aussi passionnantes l'une que l'autre, et pour cause : elles sont nourries par des documents pour la plupart inédits, en particulier les photographies de Léopold Poiré : Nancéien, ce photographe venait alors observer et immortaliser la mutation de Metz, en visiteur "français", et ses collections contribuent aujourd'hui à entretenir la mémoire de cette période si singulière de la longue histoire messine.

Consacrée à "la naissance d'une nouvelle ville", la première partie illustre grâce à la force d'images rares ce que l'histoire a raconté : le démantèlement des portes et des remparts décidé par l'empereur Guillaume-II lui-même, la quasi entière disparition de fortifications devenues obsolètes, levant ainsi un obstacle au développement urbain. Dans ces pages, peu bavardes mais tellement éloquentes, la démolition de la porte Serpenoise provoque un étonnement sans égal, notamment lorsque l'image de sa reproduction, à l'emplacement qui est toujours le sien aujourd'hui, montre à l'arrière plan le palais du gouverneur, fraîchement construit, sans la moindre trace de végétation entre les deux monuments !

Au détour du récit photographique de ce gigantesque chantier, voici des séminaristes en goguette là où, avant, se tenait un fossé rempli d'eau, au pied de la tour Camoufle préservée. Cette scène aurait pu servir de transition avec l'autre partie du livre, qui lève le voile sur des "scènes de la vie quotidienne" peu vues et plutôt méconnues, plus de cent ans après... Un tramway tiré par des chevaux passe rue du Palais, les soldats coiffés du casque à pointe défilent rue du Petit Paris, une calèche débouche de la rue Serpenoise, des gamins en culotte courte posent en haut de la rue des Jardins tandis que, quai des Régates, une épaisse fumée noire s'échappe des bateaux de plaisance baptisés Sophie et Frieda, prêts à embarquer en direction de Moulins-lès-Metz... Toute une époque longtemps tue, une réalité - celle d'une ville ayant changé de pays - aujourd'hui sortie de l'oubli par le pouvoir des archives. Un livre économe de mots, où les légendes percutent : et pour cause, les photos disent beaucoup.

- La vie à Metz - Les années impériales
Maxime Bucciarelli, Serge Domini éditeur, 176 pages, grand format, 29 euros
 
  • La guerre, et après...

17 juin 1940. "Comme en 1918, l'armée vaincue abandonne la forteresse sans combattre (...). Loin de la liesse de 1918, une très petite minorité de Messins vient accueillir les troupes allemandes..." Le dernier ouvrage de Christian Fauvel ne nous fait pas seulement revivre la vie quotidienne, à Metz, de 1940 à 1950, c'est-à-dire de la tourmente au renouveau, comme le souligne le sous-titre. Cartophile patenté, collectionneur de photos anciennes, l'auteur fait aussi oeuvre d'historien en accompagnant les 600 images de cet album de textes nombreux qui replacent chaque séquence dans son contexte, avec un souci de la précision et un sens du détail qui ajoutent à l'intérêt du récit photographique.

Ainsi, le décompte des habitants dresse le rappel d'une ville exsangue : 83 000 habitants en 1936, deux fois moins trois ans plus tard après la mobilisation et un premier exil de civils, à peine 20 000 en 1940 quand Metz, pour 4 ans d'une seconde annexion, redevient garnison allemande. Dans cette tourmente, l'opération de germanisation trouve des illustrations éloquentes : l'effacement de l'enseigne du Républicain Lorrain pour celle du Metzer Zeintung ; l'opéra-théâtre détourné en haut lieu d'une propagande ostentatoire ; des galas de boxe à l'hôtel des Mines sous le drapeau nazi ; des statues françaises déboulonnées et mises à l'écart... Les nazis défilent et, "pour quelque temps, les rires des enfants cachent les cris de guerre" : la foire de Mai bat son plein. Au bout de cette galerie, Christian Fauvel donne la parole aux deux derniers survivants des résistants de l'Espoir français, trace le portrait d'un Malgré-Nous messin, reproduit le témoignage d'un habitant du Sablon bombardé : le choc des photos n'empêche pas le poids des mots...

Après la Libération, avec le retour de la France, s'ouvre la deuxième partie du livre. "Ils sont partis ! Nous sommes libres", s'enthousiasme l'affiche des FFI. C'est l'heure de la reconstruction, et celle des ponts se révèle idéale pour l'exercice de la photographie. Les visites de Churchill, celles de de Gaulle, les commémorations... Et la vie qui reprend son cours, à l'image des fêtes populaires, des loisirs, de Metz-Plage (une piscine en plein air creusée dans la Moselle dont les anciens se souviennent encore !), le travail à la Manufacture des tabacs... Par le texte autant que par l'image, cet album entretient, lui aussi, le nécessaire devoir de mémoire.

- Metz, 1940-1950, de la tourmente au renouveau
Christian Fauvel, éditions des Paraiges, 288 pages, 35 euros
 

Romans

  • Faites l’amour
    pas la guerre

« Bienheureuse, légère est la ville en cette tiède soirée d’été et je t’aime mon amour. Il se fait nuit et Metz frétille, encore pleine du soleil qui a enflammé le jour. Une lumière jaune cru, presque albe. La cathédrale s’étoffe maintenant d’une robe ocre et de cuivre, la ville grouille et scintille et je t’aime mon amour… » Les premières lignes D’un cœur léger, carnet retrouvé du Dormeur du val, annoncent toute la beauté et l’audace de ce récit poétique de Loïc Demey. La guerre de 1870 comme vous ne l’avez jamais lue, chez Cheyne éditeur, par l’auteur du déjà très remarqué Je, d’un accident ou d’amour, fulgurante prouesse sur l’amour raconté sans verbe, qui a valu à l’auteur le prix de la révélation de la Société des gens de lettres, catégorie poésie. 

- D'un coeur léger, carnet retrouvé du Dormeur du val
Loïc Demey, Cheyne éditeur, 96 pages, 17 euros 
 
  • Nouvel état d’Anne

Connue pour son ado d’appartement qu’il a fallu élever (Comment élever un ado d’appartement) puis dont il a bien fallu se débarrasser (Comment se débarrasser d’un ado d’appartement), deux succès d’édition, la Messine Anne de Rancourt revient en librairie avec un roman bien différent et tout aussi réussi : Il faut rentrer maintenant, édité aux Paraiges, peut se lire comme une enquête policière, en apnée, le cœur battant la chamade. En s’attachant aux destins de deux femmes, en nous transportant dans l’espace et dans le temps, de Metz à la Bretagne aujourd’hui en passant par Agadir et le tremblement de terre de 1960, Anne de Rancourt  nous entraîne dans le sillage de cette écriture vive et efficace qu’apprécient chaque jeudi les lecteurs de l’hebdomadaire La Semaine à travers ses États d’Anne.  

- Il faut rentrer maintenant
Anne de Rancourt, éditions des Paraiges, 184 pages, 16 euros
 

Romans policiers

  • Vengeance au long cours

Troisième enquête (déjà !) pour le commissaire Coudrelier, le héros né de l’imagination fertile de Raoul Nèje. Cette fois, l’enquête partie de Metz nous emmène jusqu’en Guyane. Il y est toujours question de quête de vérité et d’identité, de vengeance et de dissimulation, le tout dans un récit haletant parfaitement maîtrisé, à l'image du personnage central et de ses proches, auxquels les lecteurs s'attachent davantage au fil des volumes.

Après Aveux mortuaires et Mémoires vives pour lettres mortesLes foudres de Némésis confirment le talent d'un auteur épris d'Histoire, à l'aise avec la fiction tout en se montrant viscéralement attaché au devoir de mémoire. On en redemande !

- Les foudres de Némésis
Raoul Nèje, éditions des Paraiges, 204 pages, 16 euros
 
  • Le mal de Louis XV

Août 1744. A peine arrivé à Metz, Louis XV tombe mystérieusement malade au moment même où une série d’actes effroyables sème la terreur en ville. Les deux affaires seraient-elles liées ? Avec Les élixirs messins, Steve Rosa propose un polar historico-culinaire offrant une nouvelle lecture et une clé parfaitement plausible à une vieille énigme de plus de deux cents cinquante ans. Entre intrigues de cour et authentiques recettes de cuisine, nous voici plongés dans la vie quotidienne de Metz au XVIIIe siècle !

- Les élixirs messins
Steve Rosa, éditions des Paraiges, 126 pages, 18 euros